1. De Venise à Paris
Les Noces de Cana de Véronèse est l'un des dix-huit tableaux (auxquels s'ajoutent deux statues) que trois représentants du gouvernement Français, les peintres Jean Simon Berthélemy et Jacques Tinet, ainsi que le chimiste Claude Louis Berthollet, membres de la Commission pour la recherche des objets de science et arts en Italie, sont autorisés à prélever sur le territoire de la République de Venise en vertu du traité de Milan, signé le 16 mai 1797.
On roule l'immense toile sur place à San Giorgio Maggiore, sur un cylindre "de grand diamètre" en intercalant "un lit de feuille de papier blanc" entre chaque révolution, le tout "enveloppé d'une toile et bien serré au moyen d'une bande roulée en hélice autour d'un cylindre, d'abord dans un sens, puis dans un autre, en sorte que tout mouvement est impossible".
La caisse contenant le cylindre est embarquée avec d'autres le 26 septembre sur la frégate La Sensible dotée de trente-deux canons pour la sécurité et doublée en cuivre pour l'étanchéité.
Le navire aborde Toulon le 28 janvier 1798. Par peur des rats, qui ont déjà rongé leur toiles d'emballages, le capitaine fait aussitôt débarquer et entreposer les caisses, qui sont transportées le 28 février sur La Créole. Celle ci remonte le Rhône jusqu'à Lyon, puis la Saône, et emprunte finalement le canal du Centre à Chalon. Un convoi de bateaux plus légers gagne la Seine par les canaux de Briare et du Loing, et arrive à Paris au port de l'Hôpital le 16 juillet.
Les oeuvres sont transportées sur des chars qui font leur entrée solennelle le 27 juillet 1798, anniversaire de la chute de Robespierre, dans un convoi triomphal "des Sciences et des Arts" au cours d'une fête qui dure deux jours. Les oeuvres vénitiennes sont transportées par un char portant une inscription composée par l’archéologue Antoine Mongez : "Iris de ses couleurs embellit leurs palettes". Les Noces de Cana sont solennellement exposées dans le Salon carré le 8 novembre 1798.
(Source: Grande Galerie/Le Journal du Louvre. N°1 Automne 2007)