Un concert avec les "I solisti veneti"

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Un concert avec les "I solisti veneti"

Messagepar Marianne » 07 Avr 2008 18:53

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Un vent de Venise, la Cité des Doges, a soufflé sur l’église Saint-Joseph (USJ) où ont officié les « I solisti veneti » placés sous la houlette du maestro Claudio Scimone. Art de la musique baroque surtout, grâce à la collaboration conjuguée de l’Institut culturel italien au Liban et du Conservatoire national supérieur de musique. Un monde sonore tout en tonalité feutrée et élégante avec des pages de Vivaldi, Torelli, Cimarosa et une note soyeuse pour une impalpable mélodie de Rossini, ainsi que les trémolos du plus sorcier des violonistes, Niccolo Paganini. Avec dix bonnes minutes de retard sur l’horaire annoncé, des rajouts, des suppressions et des inversions dans l’ordre des opus du menu inscrit sur les cartons d’invitation. On ne boude certes pas le plaisir d’écouter ce prestigieux ensemble, mais un programme annoncé est quand même un certain conditionnement….

Ouverture donc avec le Concerto en ré majeur pour trompette et cordes de Guiseppe Torelli, qui a précédé de peu Vivaldi et qui, pour certains esprits avisés, l’a même influencé, à la fois organiste à Bologne et auteur de nombreuses cantates. Noblesse de style, sans perdre de vue un certain sens de la virtuosité dans cette narration aux tonalités cuivrées et pimpantes. Le soliste Roberto Rigo a tous les accents convaincants pour cette prestation où l’air jailli du métal luisant et doré se mêle subtilement aux silences des vieilles pierres de l’église illuminée et remplie jusqu’aux derniers bancs.
Pour prendre le relais, un opus pour mandoline et cordes de Vivaldi d’une délicieuse fraîcheur, notamment ce largo cristallin, délicat, mélodieux et tendre sous les doigts du soliste Ugo Orlandi, maître absolu dans l’art de pincer avec dextérité les cordes.
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Messagepar Marianne » 07 Avr 2008 18:55

Avant de conclure la première partie du programme, la magie de la clarinette avec l’Introduction et variations en mi bémol majeur de Gioachino Rossini, tiré d’un thème de La dame du lac. Magie insaisissable, enrobée d’une mélodie fluide, de modulations douces, d’une harmonie oscillant entre finesse, esprit, fraîcheur, vélocité et naturel. Le soliste Lorenzo Guzzoni, longuement ovationné par le public, a certainement du souffle pour une si brillante narration.
Un opus de Domenico Cimarosa (peut-on oublier son Mariage secret ?), maître de l’opéra bouffe, avec le hautbois du soliste Silvano Scanziano et voilà que les instruments à vent tiennent l’auditoire sous leur coupe…
Petit entracte, avec agitation de l’ensemble de l’orchestre pour retrouver les partitions du Prêtre roux égarées lors du voyage, et explication de tout ce chambardement ! Pour gagner du temps, maestro Scimone propose un air de Paganini. Qui s’en plaindrait ? Et se pressent les trémolos, les lamentos, les sanglots, les « rossignolades » et les pizzicati des violons pour cette alerte Variation sur le canal de Venise, avec un moment de déroute et de cacophonie incompréhensible. Petit fou rire des musiciens et amusement de la salle dont les yeux restent quand même rivés sur les archets et les cordes pour cette joyeuse barcarolle…

Et arrive (avec les partitions) le moment tant attendu, le plat substantiel. On retrouve avec plaisir les vibrantes volutes des Quatre saisons du Prêtre roux, œuvre qui a passé le cap des siècles et dont les échos secrets et charmeurs défient la beauté de toutes les saisons du monde. Quatre saisons où le printemps, l’été, l’automne et l’hiver ont des couleurs saisissantes sous les archets des solistes Lucio Degani et Chiara Parrini, unique musicienne féminine de l’ensemble réunissant, en toute simplicité, grâce, beauté et talent.
Palette sonore riche pour les couleurs d’un arc-en ciel merveilleux où les sensations, l’émotion et les vibrations empruntent aux temps, au soleil, au frimas, à la pluie, aux embellies et aux horizons des tonalités et des timbres qui n’arrêtent pas de surprendre et de séduire l’auditeur… Contrastes et ampleur d’une narration, certes ornée, mais où le soliste a beaucoup à dire et à faire…Colorée, suggestive, parfois même dramatique, cette œuvre toute en nuance est en fait une véritable symphonie descriptive. Quatre concerti, composés chacun de trois mouvements entre rythmes vifs et lents, servent de solides assises pour une narration pastorale d’un lyrisme singulier...
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Messagepar Marianne » 07 Avr 2008 18:59

Joyeux, habité du chant des oiseaux, du murmure des sources et du souffle des zéphyrs, le Printemps a un allegro débordant de vie. Un violon qui imite le son de la musette, instrument des pastoureaux, et voilà que l’auditeur est au milieu d’un pré en fleurs… Entre pianissimos et fortissimos, la nature se réveille pour évoquer un printemps à la sève bouillonnante…
L’Été est représenté à travers un orage, avec la plainte des bergers et la foudre qui décapite le blé… Des images sonores expressives et fortes. Pour l’Automne, une fête paysanne mène la ronde des notes dans une joyeuse farandole où la fanfare des chasseurs se fait entendre dans un impétueux allegro final. Pour le dernier concerto, L’hiver, de grands frissons parcourent l’allegro, un calme secret plane sur le largo telles ces journées tranquilles et rêveuses au coin du feu, tandis que les déchaînements de la tempête clôturent l’allegro du dénouement.
Une salve d’applaudissements d’un public nombreux, sélect et recueilli a salué cette prestation d’une saveur et d’une intensité profondément italiennes… De l’élégante musique du Prêtre roux aux épanchements ondoyants, d’une soyeuse fluidité de Rossini, que Stendhal tenait comme son idéal artistique, la musique avait toutes les allures d’une invitation à un voyage hors de l’espace et du temps…

Un petit bis, une Serenade de Riccardo Riga, frileuse randonnée sonore que les tsars affectionnaient, paraît-il, mais rien ne remplace les chaleureux vibratos des Quatro stagionni qui résonnent encore, avec une délicieuse persistance, dans l’oreille et le cœur des auditeurs…


Article écrit, par Edgar Davidian, dans L’Orient du Jour. Le quotidien libanais d'expression française. Beyrouth, lundi 07 avril 2008.


(USJ = Université Saint Joseph. Cette université est implanté à Beyrouth, Liban).
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Messagepar Nicole » 08 Avr 2008 14:51

Merci pour cette info. :lol:
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